Je ne cesse d’observer la société politique de notre temps et je ne cesse de croire qu’un tournant décisif a été franchi. D’une part, ce qui est remarquable est ce qui aujourd'hui happe l’humain dans sa totalité à travers sa nasse technologique de l’hyper relation du flux numérique et le nouveau visage du législateur, du Prince qui nous gouverne.
On ne peut qu’observer une verticalité du pouvoir ordonnée au grand tout de la finance mondiale mais sans la présence d’abscisse, sans une horizontalité qui modérerait l’exercice du pouvoir politique.
La loi n’est que l’expression d’une seule volonté humaine quasi divine, qui nie toute autorité naturelle qui pourrait surgir des rapports entre les hommes, rapport institué par la diversité des mœurs, des lieux, des climats, des coutumes et des desideratas les plus élémentaires.
Si Montesquieu s’intéressait à la nature des choses, des causes physiques, des êtres et à la séparation du juste de l’utile, le législateur d’aujourd’hui devient l’instigateur de cette variable qui irrigue tous rapports de force entre les hommes, entre les citoyens..En définitive, nous pensions être « rentrés » en société pour quitter l’état de nature, état de la guerre de tous contre tous, mais c’est précisément l’inverse qui s’est produit.
Locke et Pufendorf l’avaient déjà observé. Dès que la société se forme, nait un « état de guerre » entre les hommes et entre les nations. Les instincts les plus vils comme l’ambition et la cupidité sont exacerbés. Que reste t-il du bien commun, du bien vivre-ensemble ?
Les mots de Pascal dans Les Pensées et le chapitre intitulé : « la raison des effets » résonnent encore : « Ne pouvant faire que le juste fut fort, on a fait que le fort soit juste ». Pourquoi pactisons-nous, quels sont les gains du contrat ?
Ne pouvons nous pas trouver un exutoire, un garde-fou pour nous prévenir de tout abus de pouvoir, inventer une norme, un pilier qui relierait enfin les deux valeurs que sont peut-être la modération et la vertu ?